Doris-pyjama

Chromodoris quadricolor | (Rüppell & Leuckart, 1828)

N° 2360

Ouest de l'océan Indien, mer Rouge, Méditerranée orientale

Clé d'identification

Corps allongé, étroit et rectiligne
Pied se terminant en pointe fine
Manteau étroit et épais
Manteau à 4 couleurs : orange, noir, blanc et bleu
Rhinophores et panache branchial orange foncé
Longueur maximale : 5 cm

Noms

Autres noms communs français

Doris à quatre couleurs, nudibranche pyjama

Noms communs internationaux

Pyjama slug (GB), Cromodoride del mar Rosso (I), Babosa pijama (E)

Synonymes du nom scientifique actuel

Doris quadricolor Rüppell & Leuckart, 1830

Distribution géographique

Ouest de l'océan Indien, mer Rouge, Méditerranée orientale

Zones DORIS : ● Indo-Pacifique, ○ [Mer Rouge]

Ce doris est originaire de mer Rouge et des côtes ouest de l'océan Indien (jusqu'à la latitude de la Tanzanie). Il est aujourd'hui présent en Méditerranée orientale (espèce lesseptienne*).

Biotope

Il est fréquemment rencontré sur substrats* durs, récifs ou coralligène, en particulier sur les éponges dont il se nourrit, entre 5 et 30 m de profondeur.

Description

Ce doris a un corps allongé, droit et étroit, d'aspect général lisse et plat. Il peut atteindre 5 cm de long. A l'arrière, le pied se termine en une pointe effilée.
Les 4 couleurs du manteau* sont une clé d'identification : la périphérie est marquée d'un très fin liseré blanc et d'une épaisse marge jaune-orangé, puis d'un nouveau cercle blanc intérieur, fin et s'épaississant à l'avant, devant les rhinophores*. Le centre du manteau est rayé de 3 bandes longitudinales noires, épaisses, alternant avec 2 bandes longitudinales bleu opalescent, plus fines. La présence des reflets bleus est capitale dans l'identification mais, malheureusement, pas toujours visible sur les photos.
Ces lignes colorées se retrouvent sur le pied. Celui-ci est bien visible car le manteau est étroit et donc peu recouvrant. Il est également épais et rigide au toucher.
Les rhinophores sont lamellés sur leur sommet. Ils sont orange foncé et translucides tout comme le panache branchial. Celui-ci est plutôt dense.
Il faut préciser que cette description est un peu théorique et que certains individus ne présentent pas l'ensemble de ces critères.

Espèces ressemblantes

Le groupe des "Chromodoris striés" ("black lined") usant de couleurs similaires (orange, blanc / bleu et noir) comprend plusieurs espèces, parfois très proches et pas toujours faciles à distinguer. Citons néanmoins :

Chromodoris africana
Eliot, 1904, est très proche de C. quadricolor dont il partage une bonne partie de la distribution africaine et a été longtemps une source de confusion. Ce doris africain est beaucoup plus trapu, presque de forme ovale. Il n'a que 3 couleurs (le bleu est absent, remplacé par du blanc) mais les bandes de couleurs sont réparties à peu près de la même façon, sans néanmoins la présence du très fin liseré blanc extérieur. Les 3 bandes noires sont plus larges. Théoriquement, le cercle interne blanc est plus épais. Enfin, le manteau est large et très fin, peu rigide au toucher, contrairement au manteau épais de C. quadricolor.

Chromodoris magnifica (Quoy & Gaimard, 1832), présent dans le Pacifique occidental (Malaisie, Indonésie, des Philippines au Japon, Papouasie-Nouvelle Guinée et Australie, ce qui aide à le distinguer du doris-pyjama), est proche de C. quadricolor comme de C. africana. Il n'a que 3 couleurs et le bleu central sur le manteau n'apparaît pas ici non plus. Le liseré blanc externe a une certaine épaisseur.

Chromodoris strigata
Rudman, 1982, dont la distribution recoupe en zones africaines celle de C. quadricolor, montre un pourtour du manteau orange clair et des lignes longitudinales noires, généralement assez fines, sur un notum* blanc. Mais le manteau paraît afficher sur ses zones claires comme un "jeu d'ombres et de lumières", grises, assez identifiables et absentes sur le doris-pyjama.

Chromodoris hamiltoni
Rudman, 1977, fréquente les mêmes eaux africaines que C. africana (à l'exception de la mer Rouge). Les couleurs sont les mêmes avec le centre du notum* qui se teinte de bleu pâle. Mais il y a souvent un peu de pigments orange diffus entre les lignes noires.

Chromodoris colemani
Rudman, 1982, est une espèce que l'on peut rencontrer dans les Philippines, du Japon aux îles Marshall, ainsi qu'en Papouasie-Nouvelle Guinée et en Australie. Il a souvent le centre du manteau bleu mais présente généralement des lignes orange bien visibles s'intercalant entre les bandes noires.

Chromodoris michaeli
Gosliner & Behrens, 1998 est connu en Indonésie et aux Philippines. Le manteau est très ressemblant à celui de C. quadricolor mais la ligne centrale noire est discontinue, formant parfois même plutôt des points ou des taches. Rhinophores et branchies sont orange clair.

Plusieurs espèces de Chromodoris montrent aussi un dos bleu avec des lignes longitudinales noires. Mais soit le pourtour du manteau n'est pas orange (C. lochi, C. boucheti, C. willani…), soit le bleu du manteau est trop soutenu pour qu'il puisse s'agir de Chromodoris quadricolor (C. annae, C. elisabethina).

Un certain nombre d'autres espèces ressemblantes, à moins que ce ne soit des variantes des espèces supra, sont encore en mal d'identification.

Alimentation

Ce doris se nourrit d'éponges rouges (Latrunculia spp., Negombata spp.) et d'éponges gris foncé (Semitaspongia sp.) qui contiennent des toxines (latrunculines) que le nudibranche stocke dans les glandes du manteau comme éléments de défense.

Reproduction - Multiplication

Les nudibranches se reproduisent par voie sexuée. Ils sont hermaphrodites* et ovipares*.
L’accouplement se fait toujours deux à deux dans un rapport proximal, les individus se présentant tête-bêche sur leur côté droit. En effet, les organes de reproduction, de couleur orange chez Chromodoris quadricolor, débouchent derrière la partie céphalique, sur le côté droit du pied.
Entrés en contact, les deux partenaires échangent leurs spermatozoïdes respectifs puis se quittent. La fécondation est interne et chacun pond ensuite de son côté.
La ponte de C. quadricolor se présente sous la forme d'un ruban large et plat, grisâtre et translucide, disposé sur le rocher, à proximité d'une des éponges-proies.

Vie associée

Selon les régions, ce doris est souvent posé sur une éponge rouge, branchue ou en éventail, ou sur une éponge grise en boule.

Divers biologie

Les mollusques opisthobranches possèdent dans la cavité buccale une sorte de bande râpeuse qui leur sert à s'alimenter, en agissant comme une râpe sur les spongiaires constituant leur nourriture. C'est la radula*. Cet élément est constitué de plusieurs rangées de petites dents dont l'organisation est un élément déterminant dans la nomenclature, la disposition des denticules étant propre à chaque espèce.

Les deux rhinophores situés sur la tête des nudibranches sont des organes chimio-sensoriels. Ils procurent à l'animal des informations sur l'environnement grâce à l'analyse des molécules chimiques contenues dans l'eau.

La plupart des Chromodoris (c'est le sens de leur nom scientifique et c'est donc le cas pour notre Chromodoris quadricolor) affichent des couleurs et des motifs extrêmement voyants. Quand on sait que ces animaux sécrètent une substance chimique, produite à partir de leur alimentation en spongiaires (notamment la toxine latrunculine extraite des porifères Latrunculiidés), qui les rend impropres à la consommation, soit immangeables, soit toxiques, on comprend qu'ils tiennent à le faire savoir à d'éventuels prédateurs. C'est la fonction (dite aposématique*) de ces robes remarquables que de dire : "N'essayez même pas de me goûter, je suis dangereux !".

Bien que ce point n'apparaisse dans aucune des descriptions du doris-pyjama, on remarque sur la majorité des photos de cette fiche que les feuillets jaune foncé du panache branchial sont surlignées d'un très fin liseré blanc. Est-ce un caractère constant ou simplement occasionnel ?

Informations complémentaires

Les différentes espèces se ressemblant peuvent également produire des variantes de motifs comme de couleurs, rendant plus complexe encore la discrimination et c'est d'autant plus flagrant dans ce groupe artificiel aux caractéristiques visuelles proches des "chromodoris striés" auquel on associe Chromodoris quadricolor. C'est pour cela qu'il est fort utile pour la taxonomie de découvrir la nature exacte des proies consommées par chaque espèce ainsi que les caractéristiques des pontes respectives. En l'espèce, la nature particulière des pontes de C. quadricolor, aussi plates et translucides, semble une curiosité dans la grande famille des Chromodorididés.

Le premier spécimen répertorié en Méditerranée l'a été en 1986 d'après une découverte à 30 m de profondeur, en mer Ligure (à Capo Mortola, Imperia, Italie). C. quadricolor a été depuis rencontré sur la côte turque (près d'Antalya) par 15 m de fond ; sur la côte tunisienne également. Pour les premières rencontres, l'hypothèse d'introductions accidentelles (ou pas : les nudibranches sont quasiment impossibles à maintenir en aquarium et posent de gros problèmes) depuis des aquariums tropicaux a été posée par certains chercheurs, alors que d'autres scientifiques assurent une migration lesseptienne. Il semble que les nouvelles rencontres accréditent cette dernière position [Öztürk & Can 2006].

Origine des noms

Origine du nom français

Doris-pyjama : les rayures du manteau rappellent sans doute la "livrée" classique d'un pyjama...

Origine du nom scientifique

Chromodoris : du grec [chrom-] = couleur ; et du grec [Doris] = Océanide fille d'Océan et de Téthys, épouse de Nérée et mère des 50 néréides ; donc doris de couleurs vives ;

quadricolor : du latin, pour les quatre couleurs (orange, noir, blanc et bleu) visibles sur le manteau.

Classification

Numéro d'entrée WoRMS : 139143

Termes scientifiques Termes en français Descriptif
Embranchement Mollusca Mollusques Organismes non segmentés à symétrie bilatérale possédant un pied musculeux, une radula, un manteau sécrétant des formations calcaires (spicules, plaques, coquille) et délimitant une cavité ouverte sur l’extérieur contenant les branchies.
Classe Gastropoda Gastéropodes Mollusques à tête bien distincte, le plus souvent pourvus d’une coquille dorsale d’une seule pièce, torsadée. La tête porte une ou deux paires de tentacules dorsaux et deux yeux situés à la base, ou à l’extrémité des tentacules.
Sous-classe Heterobranchia Hétérobranches
Super ordre Nudipleura Nudipleures
Ordre Nudibranchia Nudibranches Cavité palléale et coquille absentes chez l’adulte. Lobes pédieux souvent absents aussi. Respiration cutanée, à l’aide de branchies, de cérates ou d’autres appendices. Tête portant une ou deux paires de tentacules, les tentacules postérieurs ou rhinophores peuvent parfois être rétractés dans des gaines. Principalement marins ou d’eau saumâtre.
Sous-ordre Doridina Doridiens Corps aplati. Anus dorsal entouré complètement ou partiellement par des branchies de remplacement ramifiées qui peuvent être rétractées (voire absentes). Mangeurs d’éponges, habituellement armés de spicules calcaires internes.
Famille Chromodorididae Chromodorididés Doridiens au corps mou allongé et étroit, à coloration vive. Dos en général lisse, bord du manteau développé à l’avant. Pied effilé à l’arrière, dépassant du manteau. Rhinophores lamellés, tentacules buccaux courts et coniques, branchies pennées.
Sous-famille Chromodoridinae Chromodoridinés
Genre Chromodoris
Espèce quadricolor

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