Petit crustacé filiforme d’apparence
squelettique
Tête allongée et rétrécie en arrière
Antennes développées
Second segment du
corps renflé postérieurement
Mâles plus grands que les
femelles, avec segments plus longs et griffes plus grandes
Cramponné au substrat par les appendices postérieurs, le plus souvent en position dressée
Caprelle, caprelle linéaire, caprelle squelette,
caprelle fantôme
Le mot "chevrolle" a été très utilisé au XIXe siècle pour désigner différentes espèces de caprelles. C'est ce nom de chevrolle qui a été retenu par l'INPN pour désigner cette espèce et qui est utilisé par le site DORIS.
Skeleton shrimp, ghost shrimp (GB), Widderkrebs, Gespenstkrebs, Gespensterkrebs (D), Spookkreeftje wandelend geraamte (NL)
Cancer linearis Linnaeus, 1767
Oniscus scolopendroides (Pallas, 1772)
Squilla lobata (Müller, 1776)
Squilla quadrilobata (Abildgaard, 1788)
Gammarus quadrilobatus (Abildgaard, 1789)
Cancer (Gammarellus) linearis (Herbst, 1793)
Caprella laevis (Goodsir, 1842)
Caprella lobata (Bate, 1856)
Atlantique Nord et mer du Nord
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises], ● Atlantique Nord-OuestOn la retrouve dans l'Atlantique Nord froid et tempéré, depuis le Canada jusqu'à l'Ecosse et la côte ouest de la Norvège, ainsi qu'en mer du Nord.
En France, sa présence est avérée dans la Manche (Bretagne et baie de Seine) ainsi qu'en Atlantique, en particulier dans l'estuaire de la Gironde et la baie d'Arcachon. Sa présence a aussi été signalée en Méditerranée (via outils de sciences participatives) mais les références scientifiques manquent pour y affirmer positivement une présence. Cette présence éventuelle en Méditerranée est ainsi considérée comme non correctement documentée par l'INPN, qui pour l'heure l'indique absente de cette zone.
L'espèce a également été signalée dans l'Indo-Pacifique (mer du Japon, autour de la Nouvelle-Zélande, Malaisie, Philippines) mais cela résulte probablement de confusions avec des espèces locales.
On ne peut pas vraiment décrire un habitat spécifique pour cette espèce que l'on retrouve depuis la surface jusqu'à 200 m de profondeur sur des algues brunes, rouges ou vertes, des éponges, des ascidies, des hydraires, des alcyonaires. L'espèce semble plutôt ubiquiste*.
Le corps est typiquement divisé en trois
parties : le céphalon* (tête), le péréion* (thorax) lui-même
divisé en sept segments appelés péréionites*, et l'abdomen, minuscule. L'espèce est translucide et sa coloration générale est plutôt rose ou rouge ; les yeux sont noirs.
La longueur totale des chevrolles scolopendroïdes est mesurée de l’extrémité antérieure de la tête jusqu’à l’extrémité postérieure de l’abdomen.
Le mâle peut mesurer jusqu'à 2 cm de longueur.
La tête porte deux paires d'antennes velues, avec les antennes 1 les
plus grandes. Elle possède une petite bosse arrondie
médio-dorsale.
Les péréionites 1 et 2 sont allongés, le deuxième
étant le plus long.
Le péréionite 3 porte un tubercule arrondi
postérieurement.
Le péréionite 5 possède deux paires de petites
bosses arrondies.
Les péréionites 6 et 7 présentent une paire
de petites bosses pointues.
Chez le mâle, les péréionites 3 et 4 portent des branchies.
Les appendices thoraciques sont des péréiopodes*. Les deux premières paires sont des appendices de préhension appelés gnathopodes*. Ils
ressemblent un peu aux pattes antérieures des mantes-religieuses. Les deux premiers péréiopodes* présentent un dactylopodite* (ou dactyle ; "doigt", article le plus distal), qui se replie le long du propodite* (ou propode ; "pattes avant", l'avant dernier article). La seconde paire de gnathopodes est
considérablement plus grande que la première paire. Le propode et le dactyle de ces appendices
ont des bords intérieurs dentelés. La deuxième paire de
gnathopodes, la plus grande, s'insère postérieurement sur le
péréionite 2. Les péréionites 3 et 4 sont dépourvus de
péréiopodes et portent des branchies* ventrales. Ces dernières sont
environ 3,3 fois plus longues que larges. Les péréiopodes 5 à 7
sont de longueur croissante et se terminent par une forte griffe. L'abdomen est très court et fin.
Les femelles sont environ deux fois plus
petites que les mâles.
Les péréionites
1 et 2 ne sont pas allongés.
Les péréionites 3 à 4 portent, outre les
branchies, une paire de tubercules dorsaux alors que le péréionite 5 possède deux paires de petites bosses dorsales
rondes et une paire de bosses latérales pointues. Les orifices
génitaux sont également localisés sur le péréionite 5.
Les
péréionites 6 et 7 ont une paire de bosses dorsales rondes.
L'abdomen minuscule est caractérisé par une paire de lobes
latéraux.
Le gnathopode 1 ressemble à celui du mâle et le 2
s'insère sur la moitié antérieure du péréionite 2.
Les
péréiopodes et les pièces buccales des femelles et des mâles sont
similaires. Les femelles en reproduction sont caractérisées par une poche marsupiale ventrale au niveau des troisième et quatrième péréionites. Cette poche est délimitée latéralement par des oostégites* (expansions en forme de plaques à partir des segments basaux des appendices qui se forment au moment de la vitellogenèse* et qui constituent caractère sexuel secondaire).
Il faut enfin noter que les caprelles présentent d’importants changements de forme au cours de leur développement et de leur maturation. Cela rend leur taxonomie très complexe et il n’est pas rare que les jeunes et les adultes d’une même espèce soient identifiés comme deux espèces différentes. Ainsi, de manière générale, il est très difficile d'identifier les caprelles "à l'œil" et sur photo.
En France métropolitaine, il existe une quinzaine d'espèces du genre Caprella, deux espèces du genre Parvipalpus et une espèce des genres Pariambus, Pseudolirius, Protoaeginella, Pseudoprotella et Phtisica.
Les capelles des zones "DORIS" de l'outre-mer sont mal connues.
Caprella linearis est une espèce
essentiellement filtreuse. En position
dressée au-dessus de son substrat, elle étend ses antennes collectrices dans le
courant et les nettoie chacune leur tour à l'aide de ses grands
gnathopodes 2 qui ramènent la nourriture collectée aux pièces
buccales. D'ailleurs, quand le courant augmente, les
chevrolles s'alignent dans le flux et nettoient leurs antennes de plus
en plus vite. Elles semblent particulièrement résistantes
à de forts courants.
C. linearis est
également capable de brouter l'éponge mie
de pain (Halichondria panicea)
tout en y restant fermement accrochée à l'aide de ses pattes arrières.
Rien n'est connu de la reproduction de Caprella linearis.
Il est vraisemblable que, comme tous les crustacés, les femelles ne soient capables de s'accoupler que peu de temps après la mue. L’existence de soins maternels est documentée pour les caprelles dont les jeunes sont de petite taille. On peut supposer que cela devrait être le cas pour la chevrolle scolopendroïde mais sans certitude. De la même manière, les femelles portant des embryons font généralement preuve d'un comportement maternel et restent très agressives envers les mâles tout au long de la période d'incubation.
Comme tous les amphipodes, les caprelles n'ont pas de stade larvaire planctonique* et les nouveaux-nés sont des juvéniles qui ressemblent à des adultes miniatures. Ce devrait être le cas pour C. linearis
C. linearis semble attirée chimiquement par l'éponge mie de pain (Halichondria panicea) dont elle peut se nourrir.
La chevrolle est une proie de choix pour différents poissons, comme le gobie paganel (Gobius paganellus), le chabot-buffle (Taurulus bubalis) ou la gonelle (Pholis gunnellus).
Chevrolle : de l'ancien français désignant la femelle du chevreuil (aujourd'hui : chevrette).
Caprelle : francisation du nom scientifique Caprella. Le genre Caprella
est appelé chevrolle par Jean Baptiste
Pierre Antoine de Monet de Lamarck dans son ouvrage "Système
des animaux sans vertèbres" publié en 1801.
Le qualificatif scolopendroïde est probablement en relation avec l'aspect filiforme de ces
animaux et la présence de nombreux appendices évoquant la scolopendre (Arthropode myriapode terrestre, genre de mille-pattes).
Caprella
: du latin [capra] = chèvre ou petite chèvre. Diminutif. Pour expliquer ce nom, nous pourrions supposer que les mouvements de la
caprelle pour retrouver un support quand elle en a été détachée
peuvent évoquer des sauts de chèvre ou de cabri.
linearis : du latin [linearis] = linéaire.
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Arthropoda | Arthropodes | Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette. |
Sous-embranchement | Crustacea | Crustacés | Arthropodes à exosquelette chitineux, souvent imprégné de carbonate de calcium, ayant deux paires d'antennes. |
Classe | Malacostraca | Malacostracés | 8 segments thoraciques, 6 segments abdominaux. Appendices présents sur le thorax et l’abdomen. |
Sous-classe | Eumalacostraca | Eumalacostracés | Présence d’une carapace recouvrant la tête et tout ou partie du thorax. |
Super ordre | Peracarida | Péracarides | Les femelles sont dotées d'une cavité d'incubation formée par des expansions lamelleuses des péréiopodes. |
Ordre | Amphipoda | Amphipodes | Péracarides comprimés latéralement, dépourvus de carapace, et possédant de nombreuses paires d'appendices souvent modifiés. Ils sont représentés par les gammares, les talitres, les caprelles... |
Sous-ordre | Senticaudata | ||
Famille | Caprellidae | Caprellidés | |
Genre | Caprella | ||
Espèce | linearis |
Caprelle de face
Les antennes courtes et trapues ainsi que la paire de
gnathopodes 2 de cet individu sont parfaitement visibles.
On
distingue également un des gnathopodes 1 au niveau de la tête ainsi
que les branchies suspendues aux segments 3 et 4 du corps.
Bassin de la Barre, Port du Havre (76)
12/10/2014
En position dressée
Quelques caprelles en position dressée sur une cione intestinale, cramponnées par les fortes griffes présentes sur les derniers péréiopodes.
On distingue ici trois individus : un à gauche de profil, un au sommet et un à doite, plus les pattes d'un quatrième en bas de l'image.
La distance de prise de vue laissera néanmoins une petite incertitude sur l'identification certaine de l'espèce.
Oosterschelde, Zeeland, Pays-Bas, 8 m
21/08/2013
Illustration du dimorphisme sexuel
Dessins de Caprella linearis mâle (A) et femelle (B) illustrant le dimorphisme sexuel.
Les informations portées sur le mâle sont valables pour la femelle qui possède en plus des oostégites formant la poche marsupiale.
Les barres d'échelle (A et B) représentent 1 mm.
Dessins tirés de la publication [Guerra-Garcia 2002], légèrement modifiés et annotés par l'équipe de rédaction de la fiche, avec la permission de l'auteur.
Reproduction de documents anciens
2002/2018
Sur une ascidie
Dressée sur une ascidie (Ciona sp. ?), une caprelle montre son ventre. Quelques espèces se ressemblent de près et il faut parfois l'examen sous binoculaire pour discriminer à coup sûr l'identité du modèle.
Zelande, Pays-Bas, mer du Nord
07/07/2019
Des espèces ressemblantes
Il existe également d'autres crustacés Caprellidés comme les "phasmes marins", tels que les espèces du genre Pseudoprotella. Ceux-ci se distinguent des Caprella spp. par la présence de 5 épines réparties entre la tête, soudée au premier segment et les deux segments suivant.
Mais c'est toujours difficile à voir, même sur photo...
Ici, faisant environ 8-
Antibes (06), 10 m, de nuit
02/2009
Rédacteur principal : Equipe DORIS
Rédacteur : Jacques COVES
Correcteur : Pierre NOËL
Responsable historique : Sylvie DIDIERLAURENT
Responsable régional : Alain-Pierre SITTLER
Bachelet G., Dauvin J.-C. and Sorbe J.-C., 2003, An updated checklist of marine and brackish water Amphipoda (Crustacea : Peracarida) of the southern Bay of Biscay (NE Atlantic), Cahier de Biologie Marine, 44, 165-183.
Coolen J.W.P., Lengkeek W., Degraer S., Kerckhof F., Kirkwood R.J. and Lindeboom H.J., 2016, Distribution of invasive Caprella mutica Schurin, 1935 and native Caprella linearis (Linnaeus, 1767) on artificial hard substrates in the North Sea : separations by habitat, Aquatic invasions, 11, 437-449.
Dauvin J.-C., 1999, Mise à jour de la liste des espèces d'Amphipodes (Crustacea : Peracarida) présents en Manche, Cahier de Biologie Marine, 40, 165-183.
Guerra-Garcia J.M., 2002, Re-descriptions of Caprella linearis (Linneaus, 1767) and C. septentrionalis Kröyer, 1838 (Crustacea : Amphipoda / Caprellidea) from Scotland, with an ontogenic comparison between the species and a study of the clinging behavior, Sarsia, 87, 216-235.
Peattie M.E., 1981, The sublittoral ecology of the Menai Strait. II. The sponge Halichondria panacea (Pallas) and its associated fauna, Estuarine, Coastal and Shelf Science, 13, 621-635.
Shucksmith R., Cook E.J., Hugues D.J. and Burrows M.T., 2009, Competition between the non-native amphipod Caprella mutica and two natives species of caprellids Pseudoprotella phasma and Caprella linearis, Journal of the Marine Biological Association of the United Kingdom, 89, 1125-1132.
La page sur Caprella linearis sur le site de l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN