Chevrolle scolopendroïde

Caprella linearis | (Linnaeus, 1767)

N° 3619

Atlantique Nord et mer du Nord

Clé d'identification

Petit crustacé filiforme d’apparence squelettique
Tête allongée et rétrécie en arrière
Antennes développées
Second segment du corps renflé postérieurement
Mâles plus grands que les femelles, avec segments plus longs et griffes plus grandes
Cramponné au substrat par les appendices postérieurs, le plus souvent en position dressée

Noms

Autres noms communs français

Caprelle, caprelle linéaire, caprelle squelette, caprelle fantôme
Le mot "chevrolle" a été très utilisé au XIXe siècle pour désigner différentes espèces de caprelles. C'est ce nom de chevrolle qui a été retenu par l'INPN pour désigner cette espèce et qui est utilisé par le site DORIS.

Noms communs internationaux

Skeleton shrimp, ghost shrimp (GB), Widderkrebs, Gespenstkrebs, Gespensterkrebs (D), Spookkreeftje wandelend geraamte (NL)

Synonymes du nom scientifique actuel

Cancer linearis Linnaeus, 1767
Oniscus scolopendroides (Pallas, 1772)
Squilla lobata (Müller, 1776)
Squilla quadrilobata (Abildgaard, 1788)
Gammarus quadrilobatus (Abildgaard, 1789)
Cancer (Gammarellus) linearis (Herbst, 1793)
Caprella laevis (Goodsir, 1842)
Caprella lobata (Bate, 1856)

Distribution géographique

Atlantique Nord et mer du Nord

Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises], ● Atlantique Nord-Ouest

On la retrouve dans l'Atlantique Nord froid et tempéré, depuis le Canada jusqu'à l'Ecosse et la côte ouest de la Norvège, ainsi qu'en mer du Nord.
En France, sa présence est avérée dans la Manche (Bretagne et baie de Seine) ainsi qu'en Atlantique, en particulier dans l'estuaire de la Gironde et la baie d'Arcachon. Sa présence a aussi été signalée en Méditerranée (via outils de sciences participatives) mais les références scientifiques manquent pour y affirmer positivement une présence. Cette présence éventuelle en Méditerranée est ainsi considérée comme non correctement documentée par l'INPN, qui pour l'heure l'indique absente de cette zone.
L'espèce a également été signalée dans l'Indo-Pacifique (mer du Japon, autour de la Nouvelle-Zélande, Malaisie, Philippines) mais cela résulte probablement de confusions avec des espèces locales.

Biotope

On ne peut pas vraiment décrire un habitat spécifique pour cette espèce que l'on retrouve depuis la surface jusqu'à 200 m de profondeur sur des algues brunes, rouges ou vertes, des éponges, des ascidies, des hydraires, des alcyonaires. L'espèce semble plutôt ubiquiste*.

Description

Le corps est typiquement divisé en trois parties : le céphalon* (tête), le péréion* (thorax) lui-même divisé en sept segments appelés péréionites*, et l'abdomen, minuscule. L'espèce est translucide et sa coloration générale est plutôt rose ou rouge ; les yeux sont noirs.
La longueur totale des chevrolles scolopendroïdes est mesurée de l’extrémité antérieure de la tête jusqu’à l’extrémité postérieure de l’abdomen.

Le mâle peut mesurer jusqu'à 2 cm de longueur. La tête porte deux paires d'antennes velues, avec les antennes 1 les plus grandes. Elle possède une petite bosse arrondie médio-dorsale.
Les péréionites 1 et 2 sont allongés, le deuxième étant le plus long.
Le péréionite 3 porte un tubercule arrondi postérieurement.
Le péréionite 5 possède deux paires de petites bosses arrondies.
Les péréionites 6 et 7 présentent une paire de petites bosses pointues.
Chez le mâle, les péréionites 3 et 4 portent des branchies.
Les appendices thoraciques sont des péréiopodes*. Les deux premières paires sont des appendices de préhension appelés gnathopodes*. Ils ressemblent un peu aux pattes antérieures des mantes-religieuses. Les deux premiers péréiopodes* présentent un dactylopodite* (ou dactyle ; "doigt", article le plus distal), qui se replie le long du propodite* (ou propode ; "pattes avant", l'avant dernier article). La seconde paire de gnathopodes est considérablement plus grande que la première paire. Le propode et le dactyle de ces appendices ont des bords intérieurs dentelés. La deuxième paire de gnathopodes, la plus grande, s'insère postérieurement sur le péréionite 2. Les péréionites 3 et 4 sont dépourvus de péréiopodes et portent des branchies* ventrales. Ces dernières sont environ 3,3 fois plus longues que larges. Les péréiopodes 5 à 7 sont de longueur croissante et se terminent par une forte griffe. L'abdomen est très court et fin.

Les femelles sont environ deux fois plus petites que les mâles
.
Les péréionites 1 et 2 ne sont pas allongés.
Les péréionites 3 à 4 portent, outre les branchies, une paire de tubercules dorsaux alors que le péréionite 5 possède deux paires de petites bosses dorsales rondes et une paire de bosses latérales pointues. Les orifices génitaux sont également localisés sur le péréionite 5.
Les péréionites 6 et 7 ont une paire de bosses dorsales rondes.
L'abdomen minuscule est caractérisé par une paire de lobes latéraux.
Le gnathopode 1 ressemble à celui du mâle et le 2 s'insère sur la moitié antérieure du péréionite 2.
Les péréiopodes et les pièces buccales des femelles et des mâles sont similaires. Les femelles en reproduction sont caractérisées par une poche marsupiale ventrale au niveau des troisième et quatrième péréionites. Cette poche est délimitée latéralement par des oostégites* (expansions en forme de plaques à partir des segments basaux des appendices qui se forment au moment de la vitellogenèse* et qui constituent caractère sexuel secondaire).

Espèces ressemblantes

  • Sur les côtes atlantiques, Caprella mutica est probablement l’espèce qui s’approche le plus en apparence de C. linearis. Les deux espèces partagent plusieurs caractéristiques générales et quelques différences qui nécessitent une observation après échantillonnage. Il faut néanmoins noter que la longueur totale maximale des mâles de C. linearis serait d’environ 22 mm, largement inférieure à celle de C. mutica dont les mâles peuvent approcher ou dépasser 50 mm.
  • C. linearis peut être également confondue avec C. septentrionalis dont les critères distinctifs se situent essentiellement au niveau des antennes 1 et des gnathopodes 2. Pour une comparaison exhaustive de ces deux espèces, se reporter à la publication [Guerra-Garcia 2002] citée en référence.

Il faut enfin noter que les caprelles présentent d’importants changements de forme au cours de leur développement et de leur maturation. Cela rend leur taxonomie très complexe et il n’est pas rare que les jeunes et les adultes d’une même espèce soient identifiés comme deux espèces différentes. Ainsi, de manière générale, il est très difficile d'identifier les caprelles "à l'œil" et sur photo.

En France métropolitaine, il existe une quinzaine d'espèces du genre Caprella, deux espèces du genre Parvipalpus et une espèce des genres Pariambus, Pseudolirius, Protoaeginella, Pseudoprotella et Phtisica.
Les capelles des zones "DORIS" de l'outre-mer sont mal connues.

Alimentation

Caprella linearis est une espèce essentiellement filtreuse. En position dressée au-dessus de son substrat, elle étend ses antennes collectrices dans le courant et les nettoie chacune leur tour à l'aide de ses grands gnathopodes 2 qui ramènent la nourriture collectée aux pièces buccales. D'ailleurs, quand le courant augmente, les chevrolles s'alignent dans le flux et nettoient leurs antennes de plus en plus vite. Elles semblent particulièrement résistantes à de forts courants.
C. linearis est également capable de brouter l'éponge mie de pain (Halichondria panicea) tout en y restant fermement accrochée à l'aide de ses pattes arrières.

Reproduction - Multiplication

Rien n'est connu de la reproduction de Caprella linearis.
Il est vraisemblable que, comme tous les crustacés, les femelles ne soient capables de s'accoupler que peu de temps après la mue. L’existence de soins maternels est documentée pour les caprelles dont les jeunes sont de petite taille. On peut supposer que cela devrait être le cas pour la chevrolle scolopendroïde mais sans certitude. De la même manière, les femelles portant des embryons font généralement preuve d'un comportement maternel et restent très agressives envers les mâles tout au long de la période d'incubation.
Comme tous les amphipodes, les caprelles n'ont pas de stade larvaire planctonique* et les nouveaux-nés sont des juvéniles qui ressemblent à des adultes miniatures. Ce devrait être le cas pour C. linearis

Vie associée

C. linearis semble attirée chimiquement par l'éponge mie de pain (Halichondria panicea) dont elle peut se nourrir.

Divers biologie

La chevrolle est une proie de choix pour différents poissons, comme le gobie paganel (Gobius paganellus), le chabot-buffle (Taurulus bubalis) ou la gonelle (Pholis gunnellus).

Origine des noms

Origine du nom français

Chevrolle : de l'ancien français désignant la femelle du chevreuil (aujourd'hui : chevrette).
Caprelle : francisation du nom scientifique Caprella. Le genre Caprella est appelé chevrolle par Jean Baptiste Pierre Antoine de Monet de Lamarck dans son ouvrage "Système des animaux sans vertèbres" publié en 1801.
Le qualificatif scolopendroïde est probablement en relation avec l'aspect filiforme de ces animaux et la présence de nombreux appendices évoquant la scolopendre (Arthropode myriapode terrestre, genre de mille-pattes).

Origine du nom scientifique

Caprella : du latin [capra] = chèvre ou petite chèvre. Diminutif. Pour expliquer ce nom, nous pourrions supposer que les mouvements de la caprelle pour retrouver un support quand elle en a été détachée peuvent évoquer des sauts de chèvre ou de cabri.

linearis : du latin [linearis] = linéaire.

Classification

Termes scientifiques Termes en français Descriptif
Embranchement Arthropoda Arthropodes Animaux invertébrés au corps segmenté, articulé, pourvu d’appendices articulés, et couvert d’une cuticule rigide constituant leur exosquelette.
Sous-embranchement Crustacea Crustacés Arthropodes à exosquelette chitineux, souvent imprégné de carbonate de calcium, ayant deux paires d'antennes.
Classe Malacostraca Malacostracés 8 segments thoraciques, 6 segments abdominaux. Appendices présents sur le thorax et l’abdomen.
Sous-classe Eumalacostraca Eumalacostracés Présence d’une carapace recouvrant la tête et tout ou partie du thorax.
Super ordre Peracarida Péracarides Les femelles sont dotées d'une cavité d'incubation formée par des expansions lamelleuses des péréiopodes.
Ordre Amphipoda Amphipodes Péracarides comprimés latéralement, dépourvus de carapace, et possédant de nombreuses paires d'appendices souvent modifiés. Ils sont représentés par les gammares, les talitres, les caprelles...
Sous-ordre Senticaudata
Famille Caprellidae Caprellidés
Genre Caprella
Espèce linearis

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