Corps long et aplati, arrondis aux extrémités, pour une taille maximum de 11 cm
Manteau de couleur sombre et portant des stries longitudinales blanches en relief
Manteau formant un repli à l'avant, au niveau des rhinophores
2 rhinophores très courts, contractiles, clairs et striés dans leur longueur
Vit enfoui dans le sable durant la journée, ne sortant que la nuit
Tiger armina (GB), Armina tigre (I)
Pleurophyllidia undulata Meckel in Stammer 1816
Diphyllidia lineata Otto, 1820
Pleurophyllidia cuvieri Meckel, 1823
Armina undulata O'Donoghue, 1926
Méditerranée
Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française]On rencontre cette armine en Méditerranée (Espagne, France, Italie, Croatie...).
On la rapporte également sur la façade Est-Atlantique, mais aucune donnée probante n'est disponible. Cette espèce est probablement endémique* stricte de Méditerranée (P. Noël, nov. 2020, communication personnelle).
On peut lire dans la littérature encore récente qu'Armina tigrina serait rencontrée dans l'océan Atlantique Ouest. La présence de cette espèce sur les côtes Est de l'Amérique du Nord est en effet évoquée par [Abbott 1954] et l'auteur produit même une brève diagnose* sur certains individus, suivi en cela par d'autres auteurs (par exemple [Eyster 1981]). Mais cette présence nord-américaine a été clarifiée par [Thompson & al. 1990] : il s'agirait d'une nouvelle espèce à ce jour baptisée Armina abbotti (dédiée donc à... Abbott).
Armina tigrina est le plus souvent rencontrée de nuit sur les fonds sableux, voire sablo-vaseux, dans lesquels elle vit. Elle est enfouie durant la journée.
Il n'est pas rare de voir l'animal progresser dans les herbiers de cymodocée. On peut noter que même lors des rencontres nocturnes, le manteau est souvent recouvert de sable, dissimulant l'animal et le rendant difficilement reconnaissable en plongée, puisqu'il se confond avec le substrat.
Cette espèce peut être observée dès les faibles profondeurs jusqu'à 27 mètres sous la surface. On soupçonne qu'elle peut vivre plus profond.
Ce nudibranche a un corps plat et allongé, arrondi aux deux extrémités. Les individus peuvent atteindre une taille maximale de 11 cm. Le manteau* se distingue facilement du pied* qu'il recouvre en très grande partie.
Ce manteau, de couleur sombre (brun, violacé à noir), est bordé de blanc sur tout son pourtour. Il porte des stries longitudinales blanches, légèrement ondulées et en relief, d'un nombre variable (environ 30) et allant de la partie céphalique jusqu'à l'arrière. Il est souvent recouvert de sable.
Sur le dessus de la tête, le manteau fait un repli, devant un bouclier céphalique sombre (rose noirci sur le dessus et rosé en dessous). Ce repli du manteau forme en son milieu comme une encoche et, les découvrant en cet endroit du bouclier céphalique, permet à deux rhinophores*, contractiles, très proches l'un de l'autre, de se dresser perpendiculairement à l'axe du corps. Ces rhinophores clairs et de petite taille, sont striés dans leur verticalité. Devant les rhinophores, il y a une petite crête discrète.
Tout au long de chaque flanc et sous le manteau (non visibles immédiatement, donc), il y a deux sortes de zones lamellées plus ou moins perpendiculaires au corps. Les premières lamelles, derrière la tête sont les branchies* (la seconde zone lamellée est en relation avec l'appareil digestif).
La sole* pédieuse est de couleur plus claire que le manteau (rosée à gris clair) et son pourtour est également bordé d'un liseré blanc. Ce pied est légèrement anguleux à l'avant et un sillon médian est présent sur la sole.
Dans la partie droite du corps, toujours sous le manteau, se trouvent également l'orifice génital, placé vers l'avant, sous les lamelles branchiales.
Bien que partageant une distribution géographique commune, Armina tigrina est clairement distincte d'une autre Arminacée qui fréquente en sus exactement le même biotope qu'elle :
Armina maculata Rafinesque, 1814. La forme est la même mais les deux espèces se différencient aisément par l'aspect de leur manteau respectif. En effet, A. maculata possède un manteau de couleur jaune orangé et celui-ci ne porte pas des stries longitudinales mais de petits tubercules* blancs de tailles diverses et en relief.
En revanche, une autre espèce observée en Méditerranée ressemble fort à Armina tigrina. Il s'agit de :
Armina neapolitana (delle Chiaje, 1824). Même s'il est ressemblant, le manteau strié de cette dernière montre une couleur davantage rose-orangé. Le nombre de lignes longitudinales en relief est moindre (13 à 20).
Par ailleurs :
Armina loveni (Bergh, 1876) est également ressemblante, même si bien plus petite (environ 4 cm) et plus brun orangé-rougeâtre qu'A. tigrina. Elle ne peut croiser la distribution de l'armine tigrée que sur les côtes atlantiques françaises puisque A. loveni, plus nordique, y est présente depuis la Norvège.
D'autres espèces, comme Armina californica (Cooper, 1863) ou Armina gilchristi (White, 1955), sont encore très semblables à Armina tigrina car elles présentent également ce manteau de couleur sombre strié de blanc. Toutefois, les individus se révèlent être de plus petite taille qu'A. tigrina et ces espèces n'ont pas été rapportées dans l'aire géographique attestée d'A. tigrina (A. californica : côtes ouest de l'Amérique du Nord ; A. gilchristi : Afrique du Sud).
De même, Armina abbotti Thompson, Cattaneo & Wong, 1990, serait l'espèce qui remplace A. tigrina dont la réelle présence sur les côtes américaines faisait débat.
D'autres espèces du genre Armina portant des stries longitudinales sur le manteau ont encore été décrites mais présentent une toute autre répartition géographique et possèdent des manteaux beaucoup plus colorés (bleus à orangés). Certaines de ces espèces comportent par ailleurs des individus de plus grande taille qu'Armina tigrina.
Armina tigrina se nourrit d'alcyonnaires et de plumes de mer (ex. : Pennatula rubra).
Les nudibranches sont des animaux hermaphrodites* synchrones et les Arminacées ne dérogent pas à la règle. La reproduction se fera donc lors d'un rapport proximal deux à deux, la position classique tête-bêche se justifiant par la position des organes copulatoires, situés sur le côté droit de l'animal, sur la partie antérieure du pied.
La ponte des Armina se trouve sur le substrat sableux et consiste généralement en un gros cordon de glaire, contourné et retordu sur lui-même. Il est fixé par au moins une de ses extrémités. Les œufs, de couleur claire et en grande quantité, sont pris dans la glaire.
Pour ce qui concerne les modalités de reproduction et de développement propres à Armina tigrina, elles sont peu connues. L'article de [Eyster 1981] se proposant de les décrire résulte d'une erreur d'indentification et s'intéresse en fait probablement à Armina abbotti, collectée en Caroline du Sud.
Les branchies, plus de 100 lamelles respiratoires situées de chaque côté du corps, sous le manteau après la tête, précèdent une autre série de lamelles un peu différentes qui vont, elles, jusqu'à la partie postérieure. Ces autres lamelles, 36 à 40 de chaque côté et appellées en anglais hyponotal lamellae ("lamelles sous le manteau") sont en rapport avec le système digestif (elles contiennent généralement des diverticules de la glande digestive).
L'anus et le pore urinaire se trouvent sur la partie postérieure du flanc droit, en arrière des organes génitaux et sous les lamelles sus-citées.
Le bulbe buccal possède de grandes mâchoires très fortes et bombées, le bord masticateur est écailleux. Sur la radula* les dents sont nombreuses, sur plusieurs rangées (radula multisériée). La cuspide* médiane, étroite, montre 15 à 30 denticules* serrés et fins de chaque côté. Les dents latérales portent aussi des denticulations.
Puisque les armines sont des nudibranches prédateurs de cnidaires, on pourrait penser que les cnidocystes* capturés sur les proies seraient conservés et réutilisés par l'animal, à l'instar des nudibranches éolidiens (ex. : les flabellines). C'est ainsi que Bergh, descripteur de certaines espèces d'Aminacées, avait pris certaines glandes disposées latéralement sous le manteau pour des sortes de cnidosacs* ("puisqu'on distingue facilement à la loupe des "cnidopores" d'où sortent, lorsque l'animal est violemment excité, des paquets de filaments urticants"). Mais le biologiste Lucien Cuénot (1866-1951) a démenti, affirmant que ces glandes, n'étant d'ailleurs pas en relation avec les glandes hépatiques, ne contenaient pas de nématocystes* à proprement parler mais des filaments semi-rigides fabriqués par l'animal lui-même. L'auteur ne veut pas trancher sur la destination réelle de ces filaments et des cellules qui les produisent, se contentant de supposer avec prudence qu'ils ont un but défensif.
Le nombre de rayures claires et en relief sur le dos de l'animal dépend probablement du degré de maturité de l'individu.
Armine tigrée : il s'agit d'une simple francisation du nom scientifique, Armina tigrina.
Armina : plusieurs hypothèses peuvent expliquer ce nom... Une des plus probables est le rapport avec la ville d'Armina (Armine), ville de Paphlagonie (région historique d'Asie mineure, correspondant actuellement au nord de la Turquie, sur la mer Noire). On pourrait également citer Hermann (Arminius pour les romains), chef germanique de la tribu Chérusques (16 av. JC – 21 ap. JC).
On peut aussi lire ici ou là qu'en latin, armina signifie "noble". Mais cela semble douteux pour notre cas. Ceci s'appliquerait plutôt au prénom Armina dans les pays d'Amérique du Sud.
Si vous connaissez la raison exacte pour laquelle Rafinesque a utilisé ce nom pour créer le genre, écrivez-nous !
tigrina : du latin [trigrina] = rayée comme un tigre ; l'adjectif renvoie à l'aspect de la robe, avec ses nombreuses stries longitudinales noires et blanches.
Termes scientifiques | Termes en français | Descriptif | |
---|---|---|---|
Embranchement | Mollusca | Mollusques | Organismes non segmentés à symétrie bilatérale possédant un pied musculeux, une radula, un manteau sécrétant des formations calcaires (spicules, plaques, coquille) et délimitant une cavité ouverte sur l’extérieur contenant les branchies. |
Classe | Gastropoda | Gastéropodes | Mollusques à tête bien distincte, le plus souvent pourvus d’une coquille dorsale d’une seule pièce, torsadée. La tête porte une ou deux paires de tentacules dorsaux et deux yeux situés à la base, ou à l’extrémité des tentacules. |
Sous-classe | Heterobranchia | Hétérobranches | |
Super ordre | Nudipleura | Nudipleures | |
Ordre | Nudibranchia | Nudibranches | Cavité palléale et coquille absentes chez l’adulte. Lobes pédieux souvent absents aussi. Respiration cutanée, à l’aide de branchies, de cérates ou d’autres appendices. Tête portant une ou deux paires de tentacules, les tentacules postérieurs ou rhinophores peuvent parfois être rétractés dans des gaines. Principalement marins ou d’eau saumâtre. |
Sous-ordre | Cladobranchia | Cladobranches | |
Famille | Arminidae | Arminidés | |
Genre | Armina | ||
Espèce | tigrina |
Forme reconnaissable
La forme est allongée, assez plate, les parties antérieure et postérieure sont arrondies. Le manteau recouvre la plupart du corps mais on distingue bien la partie céphalique, au devant du repli dorsal.
Eglise St-Pierre, Cagnes-sur-mer (06), de nuit, 15 m
01/05/2010
Rayures noires et blanches
Le manteau brun sombre à noir est parcouru de nombreuses lignes longitudinales blanches en relief.
Cagnes-sur-mer (06), de nuit
04/08/2007
Manteau et partie céphalique
Le manteau couvre quasiment entièrement le pied mais, au niveau de la partie céphalique, il forme comme un repli, laissant paraître au centre les rhinophores. Ceux-ci s'inscrivent comme dans une encoche formée par le manteau.
Parking Moana, Cros de Cagnes (06), 15 m, de nuit
01/06/2012
Rhinophores et bouclier
On distingue parfaitement sur ce gros plan les deux rhinophores courts, blancs, striés longitudinalement, proches l'un de l'autre. Ils sont contractiles.
En avant, d'un beau rose noirci sur le dessus, le bouclier céphalique, propre au genre Armina.
Eglise St-Pierre, Cagnes-sur mer (06), de nuit
25/08/2010
Crête et rhinophores contractés
En avant des rhinophores (ici contractés) et si l'on s'approche, on peut distinguer un élément présent chez la plupart des Arminacées et notamment dans le genre Armina, une sorte de crête.
Parking du Moana, Cros-de-Cagnes (06), de nuit
25/08/2010
Balade dans les herbiers
Animal du sable, il est fréquent de rencontrer Armina tigrina dans les herbiers de cymodocée.
La Source, Cagnes-sur-mer (06), de nuit
23/06/2009
Oh ! un copaing !
Rencontre entre deux individus dans le sable. Chacun se dirige vers l'autre...
Eglise St-Pierre, Cagnes-sur-mer (06), de nuit
25/08/2010
Après une rencontre...
Après une rencontre fructueuse, chacun des protagonistes pourra aller pondre de son côté. Ici cette armine a choisi d'arrimer sa ponte à un bouquet de phanérogames.
Cagnes-sur-mer (06), 5m, de nuit
12/05/2011
Ponte
La ponte est constituée par un cordon glaireux qui contient les nombreux œufs. Cette ponte est généralement fixée à un point d'ancrage du substrat.
Cagnes-sur-mer (06), 5 m, de nuit
12/05/2011
Camouflée
Bien souvent, l'armine tigrée rencontrée de nuit porte encore beaucoup de sable sur son dos, ce qui la rend difficile à repérer...
Celle-ci semble avoir été blessée sur le côté gauche du manteau (ou bien est-elle mal formée ?). Toujours est-il que cela donne à voir le pied, souvent caché, et atteste de la marge blanche qui le borde.
Cote d'Azur, de nuit
09/06/2009
Enterrée
Si l'armine tigrée est enterrée, il est fort difficile de la voir !
Les "points blancs" sont les deux rhinophores.
Côte d'Azur, de nuit
2011
Dans le Languedoc-Roussillon
Cette espèce est également visible dans les petits fonds sablo-vaseux du Languedoc-Roussillon, comme ici dans quelques mètres de profondeur sur la commune de Frontignan. Et de nuit bien sûr
Côte sableuse, Frontignan (34), 3 m, de nuit
10/07/2013
Rédacteur principal : Fabrice KABILE
Rédacteur : Alain-Pierre SITTLER
Vérificateur : Stéphane ELLIOTT
Responsable régional : Alain-Pierre SITTLER
Abbott R.T., 1954, The habits and occurrence of the nudibranch, Armina tigrina, in southeast United States, Nautilus, 67, 83-86. (erreur d'identification !)
Báez D.P., Ardila N., Valdés A. & Acero A.P., 2011, Taxonomy and phylogeny of Armina (Gastropoda: Nudibranchia: Arminidae) from the Atlantic and eastern Pacific, Journal of the Marine Biological Association of the United Kingdom, 91(5), 1107-1121.
Cuénot L., 1914, Les prétendus nématocystes des Pleurophyllidiens (Moll. nudibr.), Archives de Zoologie Expérimentale et Générale, 54, 14-18.
Eyster L.S., 1981, Observations on the growth, reproduction and feeding of the nudibranch Armina tigrina, Journal of Molluscan Studies, 47, 171-181. (erreur d'identification !)
Kolb A., 1998, Morphology, anatomy and histology of four species of Armina Rafinesque, 1814 (Nudibranchia, Arminoidea, Arminidae) from the Mediterranean Sea and the Atlantic Ocean, Journal of Molluscan Studies, 64, 355-386.
Marcus Ev., 1977, An annotated checklist of the western Atlantic warm water opisthobranchs, J. Moll. Stud., 4, 1-23.
Thompson T.E., Cattaneo R. and Wong Y.M., 1990, Eastern Mediterranean Opisthobranchia: Dotidae (Dendronotoidea), Arminidae and Madrellidae (Arminoidea), Journal of Molluscan Studies, 56, 393-413.
La page d'Armina tigrina dans l'Inventaire National du Patrimoine Naturel : INPN