Pholade rugueuse

Clé d'identification

Noms

Distribution géographique

Manche, océan Atlantique Nord-Est et Ouest

Zirfaea crispata est présente depuis l’Islande et la Norvège, autour des îles Britanniques, en mer du Nord et dans l’ouest de la Baltique, jusqu’au golfe de Gascogne.
Elle est également présente sur les côtes nord-ouest de l’Atlantique, du Labrador, dans l’estuaire et le golfe du Saint-Laurent, jusqu’à l’Etat du Maryland aux Etats-Unis d’Amérique.
La pholade crépue serait également présente dans l’océan Pacifique Nord sur les côtes de l’île Sakhaline (Yamazaki & al. 2016).

Biotope

Zirfaea crispata est une espèce qui fore une galerie de 15 cm de profondeur environ dans les roches sédimentaires tendres (calcaire comme la craie, les argiles compactes, le grès rouge, le calcaire oolithique), la tourbe et le bois (seulement si ce dernier est gorgé d’eau).
Elle est présente du bas de la zone de balancement des marées jusqu’à environ 75 m de profondeur.

Description

La coquille de Zirfaea crispata est caractéristique. En vue latérale les valves* sont grossièrement pentagonales. Elles peuvent mesurer jusqu’à 8 à 9 cm de longueur pour une hauteur de 4 cm. Vues de l’avant ou de l’arrière les deux valves sont largement béantes et elles ne se touchent qu'aux sommets et en un point ventral. Les sommets (umbos*) sont légèrement en avant de la ligne médiane de la coquille. En avant de ces sommets, sur chaque valve, on observe la présence d’un repli lisse.

En vue latérale, un sillon radial (partant un peu en arrière du sommet) descend jusqu'à la marge ventrale. Ce sillon divise la surface de la coquille en deux parties. Une moitié, en avant (sous le repli lisse), est couverte de stries de croissance concentriques et d’environ 20 côtes radiales qui, à leurs intersections, forment des crêtes bien marquées. En arrière du sillon, seules les stries de croissance sont présentes.

Dans chaque valve, sous la charnière dépourvue de dents, on observe une longue apophyse* courbe large et plate. Le sinus* palléal* est large.

Les siphons mesurent le double de la longueur de la coquille lorsqu'ils sont en extension chez l'animal vivant. Ils sont unis sur presque toute la longueur et se séparent peu avant leur extrémité. Ils sont de couleur pâle avec des stries brun rouge réticulées*, plus serrées près des orifices.
Le siphon inhalant* est un peu plus large que le siphon exhalant*.

• Le siphon inhalant porte une dizaine de grands tentacules*, irrégulièrement digités, qui se projettent en travers de l’orifice. La répartition des tentacules en nombre et en taille est variable selon les individus. Les deux tentacules dorsaux et les deux tentacules ventraux sont souvent les plus grands. Ces grands tentacules sont aplatis latéralement. A l’extérieur de ceux-ci, on observe une série de petits tentacules faiblement digités et enfin, un anneau de nombreuses petites papilles. Les côtés des tentacules sont brun sombre. Un anneau de même couleur entoure l’orifice inhalant et les bases des tentacules digités.
• Le siphon exhalant porte un double cercle d’une soixantaine (trente selon Meyer & Möbius 1872) de petits tentacules dont les bases sont brun rouge. La valvule est à bord lisse. L’intérieur de ce siphon est faiblement pigmenté de brun rouge avec des trainées. Meyer & Möbius (1872) notent qu’avec un éclairage favorable, la surface des siphons paraît irisée d’un vert émeraude brillant.

La coquille est de couleur blanche et le périostracum* est brun clair.

Espèces ressemblantes

Plusieurs espèces de bivalves foreurs existent sur nos côtes mais la forme large de la coquille de Z. crispata et le sillon médian sont des caractéristiques qui évitent les confusions.

Barnea candida Linnaeus, 1758, la pholade blanche, mesure jusqu'à 60 mm de longueur pour 1 à 2 cm de hauteur. Elle se rencontre dans des substrats* tendres comme les craies (Manche, mer du Nord, Baltique, Atlantique et Méditerranée). On note la présence d'un petit repli sur l'umbo* à la place de la structure calcaire externe. Il n'y a qu'une seule plaque accessoire. Sa coquille est peu épaisse. Elle est présente dans l'Atlantique Nord-Est jusqu'en Méditerranée.

Barnea parva (Pennant, 1777) mesure jusqu'à 40 mm de longueur pour environ 1 cm de haut. Les lignes concentriques sont plus denses et les lignes rayonnantes sont peu marquées. Elle est présente des îles Britanniques jusqu'en Méditerranée.

Lithophaga lithophaga (Linnaeus, 1758) : cette espèce présente du Portugal à la Méditerranée n'a pas la même répartition que Z. crispata. La coquille allongée est de couleur brune ou rousse.

Petricola lithophaga (Retzius, 1788) : cette espèce, de 15 à 20 mm de longueur, à la coquille fine et fragile, est présente sur la côte atlantique, de l'estuaire de la Loire au Sénégal.

Petricolaria pholadiformis Lamarck, 1818 : la fausse pholade est une espèce qui a été introduite en mer du Nord. La coquille est mince et fragile et légèrement bâillante à l'extrémité postérieure et ne possède ni repli, ni apophyse*.

Pholadidea loscombiana W. Turton,1819 : seul le juvénile est similaire à Z. crispata. Au stade adulte, la coquille est plus fine, plus allongée et ne présente pas de béance postérieure.

Pholas dactylus (Linnaeus, 1758) : la coquille fine, fragile et blanche peut mesurer jusqu'à 12 cm de longueur, pour 1 à 2 cm de hauteur. Comme celle de Z. crispata, elle baille également des deux côtés. L'espèce est présente en Atlantique Nord-Est et en Méditerranée.

Alimentation

Comme les autres mollusques bivalves foreurs, Zirfaea crispata communique avec l’extérieur de sa galerie uniquement par ses siphons*. De ce fait, elle pompe l’eau de mer qui pénètre par son siphon inhalant* et se nourrit des organismes et matières organiques en suspension dans l’eau de mer. C’est un suspensivore* filtreur*. Les déchets (ou fèces*) sont rejetés par le siphon exhalant*. L’oxygène dissous dans l’eau de mer, en passant sur les branchies*, permet la respiration.

Reproduction - Multiplication

Chez Zirfaea crispata, comme chez de nombreux mollusques bivalves, les sexes sont séparés. Il n'y a pas de dimorphisme* sexuel chez cette espèce. Les mâles libèrent leurs spermatozoïdes* en plein eau. Ceux-ci, aspirés par la circulation branchiale de la femelle, fécondent les ovules* dans la cavité du manteau* de celle-ci. Les œufs (40 µm de diamètre) se développent dans cette cavité du manteau. Ce sont des larves* véligères* qui sont libérées dans le plancton*. Elles sont présentes pendant presque toute l’année, avec un maximum de septembre à novembre.
Ces larves (environ 300 µm) vont mener une vie planctonique* (en se nourrissant d'organismes planctoniques dont la taille est inférieure à 50 µm -nanoplancton et ultraplancton-) avant de se métamorphoser (vers 340 à 350 µm). Peu de temps après la métamorphose* elles se posent sur un substrat* favorable et commencent à forer une galerie.

Vie associée

Dans le sinus* palléal* de Zirfaea crispata, un némerte commensal* Malacobdella grossa (O.F. Müller, 1776) peut être présent.
Cette espèce peut être également l’hôte d’un copépode* ectoparasite* de la famille des Lichomogidés : Herrmannella barneae (Pelseneer, 1929).

Divers biologie

La pholade crépue fore mécaniquement les roches tendres. Elle perce des trous de section circulaire. Avec les crêtes de l’extrémité antérieure de sa coquille, elle racle la paroi de la galerie avec des mouvements de rotation. Les débris passent par la cavité palléale* et sont rejetés avec force, sous la forme de pseudo-fèces*, par le siphon* inhalant*.

Les apophyses* présentes sous la charnière de chaque valve permettent l'insertion des muscles du pied.

Informations complémentaires

La pholade crépue a été décrite une première fois au début de 1700 par un pharmacien londonien, James Petiver (1663-1718), comme « furrow-rib’d pholade mussel » (soit moule pholade sillonnée).

Z. crispata aurait été consommée par les populations côtières écossaises lors de famines.

Sur les plages de sable de la mer du Nord, des spécimens subfossiles (organismes disparus à une date relativement récente) sont de temps en temps rejetés sur le rivage. Ces spécimens sont généralement nettement plus grands que les spécimens récents.
Parfois, sur les côtes néerlandaises, on trouve des coquilles gris foncé. Il s'agit de fossiles datant de l'époque de l'Eémien (il y a environ 100 000 ans).

Curieusement, sur les plages, plus de valves gauches que de valves droites sont observées.

Origine des noms

Origine du nom français

Pholade crépue : nom vernaculaire* trouvé fréquemment.

Origine du nom scientifique

Zirfaea : le zoologiste britannique John Edward Gray (1800-1875) a publié en 1842, à titre posthume, le travail du zoologiste britannique William Elford Leach (1790-1836) rédigé en 1817: Synopsis of the Mollusca of Great Britain. Dans cet ouvrage Leach a créé (page 252) le nom de genre Zirphaea. Toutefois, l’orthographe du nom de genre a été modifiée en Zirfaea ultérieurement sans explication (l'article de Thorson, 1946, utilise Zirphaea). Selon Paul Chambers (2009), ce nom de genre ferait référence à un magicien de l’antiquité grecque. Leach avait une très bonne connaissance de la mythologie de l’Antiquité.
Cette espèce a été décrite par Carl von Linné (1707-1778) en 1758 dans son Systema Naturae sous le nom de genre Mya.

crispata : du latin [crispata] = frisé, bouclé, en référence à l’ornementation de la coquille.

Classification

Numéro d'entrée WoRMS : 140771