Chirurgien-voile indien

Zebrasoma desjardinii | (Bennett, 1836)

N° 2733

Mer Rouge, océan Indien

Clé d'identification

Corps très comprimé, à front haut et arc ventral prononcé
Alternance de bandes verticales claires et foncées, avec lignes verticales ocre s'achevant en taches de même couleur
Scalpels gris bleu dans une tache ovale bleu foncé
Nageoires dorsale et anale de grande taille présentant des rayures longitudinales ocre
Nageoire caudale parsemée de petites taches claires

Noms

Autres noms communs français

Chirurgien-voilier, chirurgien-voile occidental, chirurgien de Desjardins

Noms communs internationaux

Desjardin's sailfin tang, Indian sail-fin surgeonfish (GB), Indischer Seebader (D), Pesce chirurgo tigrato, pesce chirurgo pinne a vela (I), Pez cirujano de Desjardins (E), Indische zeilvindoktersvis (NL)

Synonymes du nom scientifique actuel

Acanthurus desjardinii Bennett, 1836
Zebrasoma desjardini (Bennett, 1836)

Distribution géographique

Mer Rouge, océan Indien

Zones DORIS : ● Indo-Pacifique, ○ [Mer Rouge]

On le trouve en mer Rouge et dans l'océan Indien jusqu'à l'ouest de Java.

Biotope

On le rencontre dans les lagons, sur les terrasses, les pentes externes et les côtes à fond corallien jusqu'à plus de 30 mètres.
Les juvéniles préfèrent les faibles profondeurs en zones abritées, où ils nagent toujours au plus près des colonies coralliennes. Ils peuvent tolérer des eaux troubles.

Description

Le corps est très comprimé latéralement, le front est haut et l'arc ventral prononcé. Sa longueur standard (longueur sans la queue) fait 1,8 à 2 fois sa hauteur. Il peut atteindre 40 cm. L'axe reliant le début de la nageoire dorsale aux nageoires pelviennes constitue la plus grande hauteur, la ligne de dos descendant ensuite de façon abrupte vers le pédoncule* caudal.
La livrée est composée d'une alternance de bandes verticales gris clair et marron foncé, parfois seulement visibles en partie antérieure où elles sont de surcroît plus larges. Les bandes foncées sont au nombre de sept à neuf. En fonction de l'humeur de l'animal, les bandes claires peuvent pâlir, ou au contraire foncer jusqu'à disparaître. Ces bandes servent de toile de fond à une série de lignes verticales ocre dont certaines peuvent être discontinues ou réduites à un segment entre deux lignes complètes. Ces lignes couvrent les deux tiers supérieurs du corps et se transforment ensuite en une série de taches de même couleur, plus ou moins irrégulièrement alignées.
Un scalpel gris bleu à noirâtre est situé au milieu d'une tache ovale d'un bleu très foncé, de part et d'autre du pédoncule caudal. Celui-ci étant lui-même bleuâtre, cette tache, parfois diffuse, est plus ou moins visible.
La tête est étroite, la distance entre l'opercule* et la ligne du museau est faible. Elle peut être de diverses nuances de marron, ou jaunâtre plus ou moins grisé, mais elle est toujours parsemée d'une multitude de petites taches blanchâtres qui partent de la nuque, passent derrière les pectorales et s'achèvent au début de la nageoire anale. Une première bande noire plus ou moins marquée part du front, traverse les yeux et s'achève sous la gorge. Le museau est très proéminent et pointu, la bouche est petite et terminale, les lèvres sont claires avec des taches blanches.
Les nageoires dorsale et anale sont hypertrophiées et leur crête est arrondie. La dorsale déployée peut faire plus de deux tiers de la hauteur du corps. Elle est brune et porte des lignes ocre dont le tracé peut varier beaucoup d'un individu à l'autre : le cas le plus fréquent est une série de lignes ocre suivant régulièrement l'arrondi de la crête, avec ou sans lignes interrompues. Mais ces lignes peuvent aussi s'organiser verticalement en début de nageoire et retrouver un tracé longitudinal ensuite, avec ou sans labyrinthe de petits segments et de points au milieu, ou former des lignes en accent circonflexe à la pointe arrondie avec ou sans segments et points, etc.
La nageoire anale est plus souvent régulière et porte des lignes ocre sur fond brun suivant la forme de la crête, les lignes les plus proches du corps intégrant souvent points et tirets. Les pectorales sont translucides à rayons brun clair et portent des taches blanchâtres sur leur base. Les pelviennes sont brunes à lignes claires et portent de petites taches blanchâtres sur leur premier tiers. La caudale est tronquée à légèrement arrondie ou légèrement échancrée. Elle est brune à fin liseré blanc et porte des taches claires plus ou moins circulaires.

Espèces ressemblantes

Il ne peut être vraiment confondu qu'avec Zebrasoma velifer (ou veliferum, synonyme de velifer selon certaines sources et taxon valide pour d'autres), qui est son alter ego du Pacifique et de l'est de l'océan Indien.
Les bandes verticales claires de la livrée de Z. velifer sont généralement mieux démarquées des bandes foncées ; les taches ocre de la face ventrale sont moins nombreuses et cantonnées au plus près de la nageoire anale, voire inexistantes ; la queue ne présente pas les taches blanchâtres à ocre que l'on voit sur celle de Z. desjardinii et elle peut être jaune avec une bande verticale blanche après le pédoncule.
Ces deux espèces se distinguent aussi par le nombre de rayons des nageoires dorsale et anale.

Le poisson-chirurgien Acanthurus guttatus pourrait aussi être source de confusion du fait de ses deux bandes claires en partie antérieure, mais son corps est couvert de petites taches blanches derrière ces bandes, sa caudale est jaune et noire et ses pelviennes sont jaune vif.

Alimentation

C'est un herbivore diurne qui se nourrit de macro-algues benthiques*, essentiellement des algues charnues vertes et rouges (des genres Ulva et Lyngbia notamment), et des organismes associés. On peut aussi le voir nettoyer la carapace* d'une tortue de passage, ou profiter de la crainte produite chez les grégoires jardiniers (Stegastes nigricans par exemple) par un herbivore plus gros (le bourse écriture Aluterus scriptus par exemple) pour piller leurs cultures.
Des groupes de 50 à 100 individus peuvent être observés en train de chercher de la nourriture. Une étude faite dans l'atoll d'Aldabra (Seychelles) montre que le territoire de nourrissage peut être supérieur à 200 m². Ces territoires sont l'objet de compétition avec d'autres herbivores, notamment des chirurgiens d'autres espèces.

Reproduction - Multiplication

L'espèce est gonochorique* (les sexes sont séparés et définitifs à la naissance). Selon une étude mettant en parallèle des populations d'Aldabra et de Palau, mâles et femelles résidant à l'intérieur des récifs passent la barrière et établissent de petits territoires temporaires destinés à la reproduction sur les pentes externes. Ces territoires font de 5 à 15 m de diamètre. Les pontes ne semblent pas dépendre du cycle lunaire et ont lieu aux marées basses.
Dans les couples, les femelles sont le plus souvent plus grandes que les mâles, qui semblent les courtiser sur ce critère. La cour du mâle commence par une montée et une station immobile dans la colonne d'eau, il est alors rejoint par une femelle qui stationne quelques minutes avec lui, puis ils redescendent vers le substrat. Les bandes claires de la livrée des deux sexes sont alors très pâles. Quand la femelle remonte, le mâle dessine des cercles à quelques mètres d'elle en nageant uniquement avec les pectorales et l'approche de temps à autre en la touchant, en position légèrement oblique, de l'arrière de son corps agité de frémissements. Quand la femelle monte rapidement vers la surface, le mâle l'accompagne contre son flanc : les gamètes* sont émis au-dessus du territoire au sommet de cette montée et le couple se sépare alors brusquement, chaque partenaire redescendant vers le fond. Les mâles attaquent les rivaux qui tentent de s'approcher pour mêler leurs gamètes à ceux du couple au moment de la ponte.

Toutefois, bien que l'espèce soit généralement considérée comme frayant par paire, un groupe de plus d'une cinquantaine d'individus a été observé en mer Rouge nageant à 6 mètres de profondeur et à 5 mètres du fond environ, et remontant régulièrement vers la surface. Les individus s'approchaient à intervalles réguliers, de manière synchrone et rapide, d'un point de la surface avant de redescendre aussitôt. Le plus souvent, la libération des gamètes n'était pas discernable après cette montée. Parfois, après une phase d'excitation plus marquée, la libération de gamètes avait bien lieu. Dans ce cas-là, les poissons redescendaient ensuite plus bas que lorsque le lâcher de gamètes n'avait pas eu lieu. Les poissons pouvaient rester peu éloignés de la surface un certain temps entre plusieurs tentatives. La nage des individus était rapide et apparemment assez désordonnée en dehors des tentatives réussies. Tous avaient un pédoncule caudal d'un bleu plus soutenu qu'à l'ordinaire, avec des scalpels bleu marine, et des couples étaient repérables dans le banc. Les individus actifs ne descendaient pas sur le fond après la ponte, et l'événement a eu lieu plus de 4 heures après la basse mer.

Les œufs sont pélagiques*. Les larves mesurent environ de 18 à 22 mm à l'installation*. Elles sont translucides avec des lignes verticales noires très nettes de largeur différente ; la colonne vertébrale et les arêtes sont parfaitement visibles ainsi que les lignes situées sur le flanc opposé du poisson. L'opercule et l'abdomen sont argentés à légèrement dorés et les nageoires sont transparentes. Le premier rayon de la dorsale est séparé, il est teinté de noir dans le prolongement de la deuxième ligne verticale (la première traverse l'œil). La lèvre supérieure, le front et le bout du pédoncule caudal sont jaunes. Une quinzaine de jours plus tard, les nageoires dorsale et anale deviennent jaune vif et très hautes mais elles ne portent pas encore de motifs en lignes. Le corps est presque triangulaire, de couleur blanche marquée de lignes verticales grisâtres plus ou moins diffuses. Seules les deux premières et les deux dernières sont nettes et certaines commencent à être bordées de jaune. La tête est jaune vif, la première ligne verticale noire qui traverse l'œil est bordée de blanc, la bande comprise entre les deux premières lignes noires est jaune.

La livrée achevée du juvénile comporte des motifs en lignes très variables d'un individu à l'autre sur les nageoires dorsale et anale, et toutes les lignes noires sont bordées de jaune. Puis le corps s'allonge, les lignes verticales ocre se multiplient, les taches apparaissent sur la partie ventrale, sur le museau et sur les nageoires dorsale et anale. La queue devient jaune à liseré translucide avec quelques taches claires.
Les juvéniles sont solitaires et restent constamment à proximité immédiate des massifs coralliens entre lesquels ils se cachent à la moindre alerte.

Divers biologie

La livrée de nuit commence par un brunissement des bandes claires sur les flancs à partir de l'arrière, seules les premières restant différenciées. La livrée complète supprime toute distinction entre bandes claires et foncées sur le corps, qui est uniformément brun, les lignes, tirets et taches ocre devenant très ternes et à peine visibles. On peut aussi observer de nuit des individus arborant la livrée diurne habituelle.

La rencontre avec un congénère inconnu et l'approche d'un danger quelconque provoquent le déploiement complet des nageoires dorsale et anale, usuellement rabattues. Ce comportement vise à intimider l'intrus. Les degrés de ce déploiement, qui peut être partiel, indiquent le niveau de stress de l'animal. Les changements dans l'usage que l'individu fait en pareil cas de ces nageoires sont très rapides.

Les scalpels ont une fonction défensive (prédateurs) et offensive (rivaux). Ils sortent de leur sillon lorsque la queue du poisson est orientée sur le côté.

Ce chirurgien vit en paire ou en petits groupes, mais il peut aussi être solitaire, ou au contraire former des bancs de 50 à 100 individus cherchant ensemble de la nourriture.

Il peut exister des variations dans la livrée en fonction des zones géographiques.

Informations complémentaires

Les scalpels de Zebrasoma desjardinii ne sont pas venimeux et il n'y a pas de cas de ciguatéra* signalés après son ingestion. Son exploitation commerciale est cependant interdite à la Réunion par mesure de prudence du fait d'une possibilité d'intoxication ciguatérique.

En tant que brouteur d'algues, il favorise l'implantation des coraux en dégageant des surfaces qui deviennent disponibles.

Plusieurs individus ont été observés sur la côte du comté de Palm Beach (USA, Floride). Cette localisation aberrante peut avoir deux causes : les opérations de déballastage faites par les navires équipés de cette capacité, ou des rejets (intentionnels ou pas) dus à des aquariophiles. Une étude parue en 2004 montre que, s'agissant des poissons tropicaux à la distribution anormale observés sur ces sites, la responsabilité de certains aquariophiles est manifeste.

Des recherches concernant l'aptitude à l'élevage des poissons tropicaux sont réalisées en vue de diminuer la pression de pêche liée au commerce aquariophile. Zebrasoma desjardinii montre une aptitude à l'élevage relativement bonne : une étude faite à La Réunion chiffre à 87 % le taux de survie à 196 jours (le taux de survie de certaines espèces peut aller jusqu'à 92 %).

Cette espèce est appréciée par les aquariophiles du fait de son aspect spectaculaire, de son tempérament relativement pacifique et de sa rusticité. Sa plus grande rareté sur le marché la rend plus coûteuse que son parent Zebrasoma velifer (ou veliferum), issu du Pacifique.

Origine des noms

Origine du nom français

Chirurgien : ce nom se rapporte aux épines érectiles qui arment le pédoncule caudal. On les appelle aussi des « scalpels », du nom de l'un des instruments tranchants utilisés en chirurgie.
voile : cette comparaison est justifiée par la grande surface des nageoires dorsale et anale quand elles sont déployées, qui peut évoquer la voilure d'un navire.
indien : du fait de sa présence dans l'océan Indien et pour le démarquer de l'espèce-sœur, Zebrasoma velifer (ou veliferum), présente dans l'océan Pacifique et appelé chirurgien-voile du Pacifique.

Origine du nom scientifique

Zebrasoma : mot composé des mots grecs [zebra], qui désigne un zèbre, et [soma], qui signifie corps. Cette composition renvoie très probablement aux rayures verticales qui ornent la livrée du poisson comme la robe de l'équidé (Zebrasoma velifer - ou veliferum - est le type du genre). Le genre a été décrit par Swainson en 1839, il comprend 7 espèces.
desjardinii : du nom latinisé de Julien Desjardins (1799-1840), zoologiste français né à l'île Maurice. Il fut l'élève, puis un collaborateur admiratif de Cuvier auquel il fit parvenir de nombreux spécimens qui seront décrits ou mentionnés dans L'Histoire naturelle des Poissons. Théodore Monod lui rend hommage dans L'Ichthyologie à l'île Maurice de 1829 à 1846, où sont mentionnées 28 espèces qui lui sont dédiées.

Classification

Numéro d'entrée WoRMS : 277555

Termes scientifiques Termes en français Descriptif
Embranchement Chordata Chordés Animaux à l’organisation complexe définie par 3 caractères originaux : tube nerveux dorsal, chorde dorsale, et tube digestif ventral. Il existe 3 grands groupes de Chordés : les Tuniciers, les Céphalocordés et les Vertébrés.
Sous-embranchement Vertebrata Vertébrés Chordés possédant une colonne vertébrale et un crâne qui contient la partie antérieure du système nerveux.
Classe Actinopterygii Actinoptérygiens Ossification du crâne ou du squelette tout entier. Poissons épineux ou à nageoires rayonnées.
Ordre Perciformes Perciformes Nageoires pelviennes très rapprochées des nageoires pectorales.
Famille Acanthuridae Acanthuridés  
Genre Zebrasoma
Espèce desjardinii

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