Mulet lippu

Chelon labrosus | (Risso, 1827)

N° 1435

Méditerranée, Atlantique Nord-Est, Manche, mer du Nord

Clé d'identification

Lèvre supérieure épaisse avec 2 à 5 rangées de papilles
Corps allongé, relativement trapu
Tache operculaire diffuse de couleur jaune or
Tache sombre à l'aisselle des pectorales
7 à 9 lignes longitudinales plus ou moins marquées
Nageoires grises, généralement sombres

Noms

Autres noms communs français

Mulet (ou muge) à grosses lèvres, muge lippu, bâtarde, meuil (Vendée), muzaru labbronu (Corse)

Noms communs internationaux

Thicklip-grey mullet, grey mullet, lesser grey mullet (GB), Muggine labbrone, cefalo labbrone (I), Lissa vera (E), Dicklippen-Meeräsche, Dicklippige Großlippige Meeräsche (D), Diklippige harder (NL)

Synonymes du nom scientifique actuel

Mugil labrosus Risso, 1827
Crenimugil labrosus (Risso, 1827)
Mugil chelo Cuvier, 1829
Chelon chelo (Cuvier, 1829)
Liza chelo (Cuvier, 1829)
Mugil corrugatus Lowe, 1838
Mugil curtus Yarrell, 1836
Mugil septentrionalis Günther, 1861

Distribution géographique

Méditerranée, Atlantique Nord-Est, Manche, mer du Nord

Zones DORIS : ● Europe (côtes françaises), ○ [Méditerranée française], ○ [Atlantique Nord-Est, Manche et mer du Nord françaises], ● Eau douce d'Europe

De l'Islande et de la Scandinavie au nord ; jusqu'au Sénégal et aux îles du Cap Vert au sud. Méditerranée occidentale et centrale.
Les bancs de Chelon labrosus migrent vers le nord de la zone de distribution au printemps en quête de nourriture puis reviennent vers le sud à l'automne.

Biotope

Le muge lippu se tient dans la zone océanique (au-delà du plateau continental) durant la saison froide. En saison chaude, c'est une espèce côtière, erratique*, fréquentant de préférence les fonds vaseux et sablo-vaseux des ports, lagunes et estuaires, mais également des criques et plages, entre la surface et quinze mètres de profondeur. Il peut remonter le cours des rivières ou des fleuves sur plusieurs centaines de kilomètres et tolère les eaux chargées.

Description

Le mulet lippu peut atteindre exceptionnellement une longueur de 80 cm pour un poids de 5 kg, mais sa taille la plus courante est de l'ordre de 50 cm pour 1,5 kg.
Son corps est allongé, subcylindrique, fusiforme et assez trapu. La tête est massive, aplatie dorsalement et porte deux gros yeux. La lèvre supérieure est épaisse et présente 2 à 5 rangées de papilles. Les orifices nasaux sont assez écartés.
Les deux nageoires dorsales sont nettement séparées, elles sont de forme triangulaire et assez courtes. La première est située au milieu du corps, elle est composée de 4 rayons épineux. La seconde comprend 1 rayon épineux et 7 à 8 rayons mous, elle est pratiquement symétrique avec l'anale qui débute par 2 épines suivies de 7 à 8 rayons souples. Les pectorales, relativement petites, sont haut placées. La caudale est large et fourchue.
Les écailles sont cycloïdes* (lisses). La ligne latérale est absente.
Le corps est de couleur gris bleuté avec des reflets verdâtres et jaunâtres. Le ventre est plus clair (blanchâtre). On observe une tache jaune operculaire diffuse et souvent une tache sombre à l'aisselle des pectorales. 7 à 9 lignes longitudinales plus ou moins marquées ornent le dos et les flancs. Les nageoires sont grises, généralement sombres.

Espèces ressemblantes

Il y a, sur les côtes françaises européennes, 5 autres espèces de muges :

Le muge doré (Chelon auratus), dont la lèvre supérieure est fine, montre une tache dorée operculaire très nette.

Le muge capiton ou mulet porc (Chelon ramada) est caractérisé par ses petites écailles et une tache noire à la base des pectorales.

Le muge sauteur (Chelon saliens), dont la lèvre supérieure est très fine, présente un corps plus élancé que celui des autres muges.

Le muge cabot ou mulet à grosse tête (Mugil cephalus) a une grosse tête au museau arrondi et des paupières adipeuses particulièrement épaisses. Vue de dessus la tête de Chelon labrosus est plus pointue que chez Mugil cephalus.

Le muge labeon (Oedalechilus labeo) est reconnaissable à sa lèvre supérieure épaisse, lisse et surélevée.

La confusion est possible aussi avec le loup ou bar (Dicentrarchus labrax), mais la forme du corps ainsi que l'allure et la position de la bouche sont très différents. Autre critère de distinction pratique : chez le bar, la nageoire pectorale est en dessous de la pointe de l'opercule branchial alors que chez le mulet, elle est au-dessus.

Alimentation

Les mulets, lorsqu'ils arpentent la bordure côtière, ingèrent les végétaux et la vase, riches en diatomées benthiques desquels ils retiennent les particules organiques nécessaires à leur croissance. Mais ils complètent aussi leur alimentation de petits invertébrés et s'aventurent en pleine eau pour capturer quelques alevins ou athérines. Leur nourriture est ainsi très variée. Les alevins se nourrissent de jour et principalement de zooplancton. L'alimentation, sur le fond, des adultes se poursuit de jour comme de nuit. La tête en bas, ils broutent en formant un angle de 45° environ avec la surface du fond.

Reproduction - Multiplication

Espèce gonochorique* (sexes séparés). La reproduction de cette espèce ovipare* a lieu en fin d'hiver. Les œufs et les larves sont pélagiques. Au printemps, les bancs d'alevins regagnent les eaux peu profondes et chaudes de la côte (plages, ports, lagunes…), bénéficiant de l'abondance de nourriture puis des températures estivales pour optimiser leur croissance.

Vie associée

Dans les bancs de muges, il n'est pas rare de voir quelques loups de taille sensiblement égale, toutefois assez faciles à distinguer malgré une silhouette proche.

Divers biologie

Les mulets ont une large nageoire caudale et un puissant (large et musclé) pédoncule caudal qui leur permettent par une nage et des accélérations rapides, d'effectuer des sauts exceptionnels de plusieurs mètres hors de l'eau. Cette faculté leur permet d'échapper à des prédateurs, y compris l'homme, en sautant par exemple par dessus les filets.

Les muges ont la particularité de posséder un gésier, fait assez rare chez les poissons. Le gésier est une extension de l'estomac dont le rôle est de broyer des fragments d'aliments de consistance dure. Le muge a une dentition réduite et assez reculée dans la gorge, elle est dite «pharyngienne». C'est une caractéristique des animaux herbivores ou détritivores, sachant que les muges ingèrent beaucoup de vase, mais peuvent aussi happer quelques petits poissons, d'où l'importance du gésier.

Les mulets sont des poissons méfiants et relativement difficiles à approcher en plongée.

L'âge maximum de cette espèce commune est de 25 ans.

Informations complémentaires

La famille des Mugilidés, au niveau de l'ensemble des mers, est riche de 17 genres avec 81 espèces. Des représentants fossiles sont identifiés depuis le Priabonien, période qui appartient à l'Eocène et qui remonte à -35 millions d'années.

Du point de vue culinaire les mulets ont souvent, à tort, mauvaise réputation. Tous les mulets sont pêchés et commercialisés, le mulet lippu est largement pêché au niveau industriel en Méditerranée et en Europe du Nord. L'élevage des mulets (à confirmer pour Chelon labrosus ?) est également pratiqué (Mugiliculture).

La poutargue (ou boutargue) :

Appelée aussi « caviar de Méditerranée », c'est la double poche d'œufs de la femelle muge que l'on nomme ici le "poutarguier", qui subit une préparation particulière. Dès les poissons pêchés, les poches (ovaires entiers) sont extraites, les veines enlevées, les œufs vidés de leur sang puis les poches sont placées dans du gros sel pendant 6 à 8 heures avant d'être rincées et mises à sécher entre deux planches au soleil durant 2 à 3 jours. Ces planches sont lestées par des poids afin d'aplatir légèrement les deux poches d'œufs. Elles sont tournées toutes les douze heures jusqu'à ce qu'elles soient bien sèches. Elles sont ensuite pendues quelques jours avant d'être consommées, soit protégées par une couche de cire ou mises sous vide pour être commercialisées.

A l'origine, spécialité de la communauté juive, la poutargue, ou plutôt «boutargue» (de Batarkha en arabe, nom qui a été déformé à l'endroit même où c'en est la spécialité, à Martigues), est devenue un produit transformé et commercialisé sur tout le pourtour méditerranéen, notamment en Provence (Martigues), en Corse (Bastia), en Italie (sous le nom de "botargua"), en Tunisie... Actuellement il en est fabriqué en grandes quantités sur les côtes ouest africaines, en particulier en Mauritanie.
Les principaux marchés de revente sont la France, l'Italie mais aussi les Etats-Unis. En Mauritanie, les œufs transformés sont achetés 15 € le kilo aux pêcheurs, 25 € aux grossistes et finissent à plus de 100 € sur les étals (ordre de grandeur en 2004).

A Martigues, capitale provençale du "caviar de Méditerranée", la saison de pêche commence fin mai et se termine en août. Les mulets sont pêchés dans le canal de Caronte entre l'étang de Berre et la mer à l'aide du "calen", un simple filet droit qui barre le canal et qui est remonté à intervalles réguliers (voir photo). En Corse et notamment à Bastia on réalise aussi la poutargue à partir des œufs de mulets et c'est une des spécialités bastiaises (mulets pêchés au filet dans l'étang de Biguglia).

Qui sont les poutarguiers ? Plusieurs espèces de muges sont concernées selon les régions (France, Italie, Afrique du Nord, Mauritanie…) et surtout leurs périodes de reproduction et de migrations. Parmi ces espèces, on retrouve entre autres Liza aurata, Mugil cephalus, Mugil capurrii et Chelon labrosus. D'autres espèces sont également utilisées pour faire de la poutargue comme le loup (bar) par exemple.

Statuts de conservation et réglementations diverses

La taille minimale autorisée pour la pêche est de 20 cm en Méditerranée française (variable selon les régions).

Origine des noms

Origine du nom français

Muge : vient de mugil et désigne un poisson de mer à tête obtuse et à deux petites nageoires sur le dos.

Mulet : du latin [mullus] qui dérive du grec [mullos] et qui désigne dans les deux cas un poisson de mer dont les rougets et les mulets ou muges font partie.

Lippu : En raison de sa lèvre supérieure épaisse.

Origine du nom scientifique

Chelon : Chelon a été créé par Petri Artedi et cité dans un ouvrage de Röse en 1793. Petri Artedi ou Petrus Arctaedius (1705-1735) était un naturaliste suédois qui connaissait bien Linné. Le "père" de l'ichtyologie selon certains !
Chelon fait penser à [chelone] qui signifie "tortue" en grec, mais c'est un piège ! En fait chellon ou chelon viendrait du grec et c'est justement le nom grec des mugils ou mulets !

labrosus: la racine latine [labr] correspond à la lèvre, ces poissons ont bien des lèvres épaisses.

Classification

Numéro d'entrée WoRMS : 126977

Termes scientifiques Termes en français Descriptif
Embranchement Chordata Chordés Animaux à l’organisation complexe définie par 3 caractères originaux : tube nerveux dorsal, chorde dorsale, et tube digestif ventral. Il existe 3 grands groupes de Chordés : les Tuniciers, les Céphalocordés et les Vertébrés.
Sous-embranchement Vertebrata Vertébrés Chordés possédant une colonne vertébrale et un crâne qui contient la partie antérieure du système nerveux.
Super classe Osteichthyes Ostéichthyens Vertébrés à squelette osseux.
Classe Actinopterygii Actinoptérygiens Ossification du crâne ou du squelette tout entier. Poissons épineux ou à nageoires rayonnées.
Sous-classe Neopterygii Teleostei Néoptérygiens Téléostéens Poissons à arêtes osseuses, présence d’un opercule, écailles minces et imbriquées.
Super ordre Acanthopterygii Acanthoptérygiens Rayons épineux aux nageoires, écailles cycloïdes ou cténoïdes, présence d'une vessie gazeuse et pelviennes thoraciques ou jugulaires, sans être systématiquement présents, sont des caractères que l'on ne rencontre que chez les Acanthoptérygiens.
Ordre Mugiliformes Mugiliformes
Famille Mugilidae Mugilidés 17 genres, environ 80 espèces. Écailles cycloïdes*, corps puissant, tête large, deux dorsales dont la 1ère épineuse. Intestin extrêmement long, de 24 à 26 vertèbres.
Genre Chelon
Espèce labrosus

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